dimanche 9 octobre 2011

Pierre Le-Tan & Patrick Modiano

Pierre Le-Tan, autoportrait (2012)
Dessinateur, né en 1950, Pierre Le-Tan a été révélé par le magazine "The New Yorker"  en 1969 qui, depuis, publie régulièrement ses dessins en couverture. Il collabore à de nombreuses publications et réalise des couvertures de livres en France et à l’étranger.

Pierre le Tan a publié de nombreux livres, dont certains en collaboration avec Patrick Modiano.


A lire sur ce blog, un portrait: Pierre Le-Tan, promeneur mélancolique


Collaborations avec Patrick Modiano :
-Memory Lane (1981)
-Poupée Blonde (1983)

Pierre Le-Tan a également illustré les couvertures des versions de poche d’une grande partie des livres de Patrick Modiano, avant que la collection Folio ne remplace ses dessins par des photographies en noir et blanc. 



Modiano a publié un compte rendu du premier livre « en solo » de Pierre Le-Tan, Rencontres d’une vie 1945-1984 (Aubier, coll. « Albums », 1986) dans Le Monde des livres, 24 octobre 1986.

En 1988, Patrick Modiano a préfacé Paris de ma jeunesse, un album dans lequel Pierre Le-Tan évoque par les dessins et les textes quelques lieux et quelques figures qui ont marqué son enfance et sa jeunesse parisienne.

A l’occasion de la rétrospective Le-Tan à Madrid en 2004, Modiano a aussi écrit un texte racontant notamment sa rencontre avec le dessinateur.


Dans Album (Aubier, 1990), magnifique recueil de dessins et de textes « sur différents thèmes qui me sont chers », Le-Tan consacre deux pages à Patrick Modiano. Un portrait en couleurs accompagne une évocation de quelques personnes qu’ils rencontrèrent ensemble « à la recherche de je ne sais quelle information, d’un morceau de puzzle égaré » : un vieux tunisien très élégant, l’acteur Simon De Brier, un ancien photographe mondain, Jacqueline Auriol…

On retrouve aussi dans cet Album plusieurs dessins qui illustrent, dans une version parfois légèrement différente, Memory Lane (le bottier de Paul, le bar Le Scarlett, le Corner Bar…) et Poupée blonde (le marin du Grand large).
L’album est par ailleurs dédicacé à « Plum et Dominique, amies inséparables », Plum étant l’épouse de Pierre Le-Tan, Dominique, celle de Patrick Modiano.



Deux sites pour aller plus loin :
-celui de la galerie Martine Gossieaux (Paris)
-celui (superbe) de la galerie Papers (Bruxelles).




samedi 8 octobre 2011

Pierre Le-Tan, promeneur mélancolique

Il a dessiné des publicités pour la mode, des tableaux, des couvertures pour plus de cent livres. Grand collectionneur, il conçoit aussi des décors et des meubles. Rencontre avec un artiste peu connu, aussi atypique que son ami Patrick Modiano.

Affiche dessinée
par Pierre Le-Tan (1998)
Pierre Le-Tan ? Son nom ne vous dit sans doute rien, mais vous connaissez ses dessins. De fins traits noirs, des ombres hachurées, le tout rehaussé d'un peu d'aquarelle. Il a dessiné les couvertures de plus de cent livres en France et aux États-Unis. Illustré des publicités pour les Galeries Lafayette, Suez, Gucci, Lanvin et même la Jouvence de l’Abbé Soury. Il a aussi imaginé les drôles de décors de Quadrille, le film de Valérie Lemercier. À cela s'ajoutent des tableaux, des affiches de cinéma, deux livres conçus avec Patrick Modiano et une quinzaine d'ouvrages signés de son seul nom, texte et images. De vrais bijoux, étincelants de finesse et d'ironie.

 Le Musée national d'Art moderne de Madrid lui a consacré une grande rétrospective il y a deux ans. Mais rien de tel en France où Pierre Le-Tan reste dans l'ombre. Au point que, flairant la supercherie littéraire, certains ont cru qu'il s'agissait d'une invention de Modiano, comme Ajar avec Gary ! D'autres ont pensé avoir affaire à un vieillard. Comment imaginer qu'un homme de moins de 80 ans consacre son temps à tracer des portraits de Gide, Colette, du couturier Jacques Fath, de l'ex-empereur Bao-Daï et autres figures parfois bien oubliées ? La rumeur l'a aussi donné pour homosexuel, vu le nombre de jeunes marins, de gigolos et d'amateurs du sexe fort que l'on trouve au fil de ses dessins.

Rien de tout cela, pourtant. Ce matin-là, quand on sonne à la porte de son appartement parisien, en face du Palais-Bourbon, c'est son dernier fils, Édouard, 3 ans, qui ouvre. Crayon en main. Le-Tan arrive dans la foulée, finissant de boutonner une chemise rayée rose, sur un pantalon de la même couleur. Il a 56 ans, les cheveux poivre et sel. Jeune père, jeune grand-père aussi. " J'ai changé de vie il y a quatre ans, déménagé, et je travaille moins ", nuance-t-il. Mais tout de même. Un ou deux livres en gestation. Des meubles peints et des décors à inventer pour quelques particuliers fortunés. Dans l'ancien pied-à-terre de Jean Cocteau au Palais-Royal, il a récemment habillé l'escalier d'un vaste trompe-l'oeil, avec de faux tableaux représentant les amis du poète : Colette, le décorateur de théâtre Christian " Bébé " Bérard, Jean Desbordes... Des traits d'une élégante sécheresse, nimbée de nostalgie. " Notre époque d'ordinateurs et de téléphones portables est quelque chose qui m'est totalement étranger, dit-il. Avec l'âge, je suis de plus en plus mélancolique. Comment exprimer cela ? Tristesse... Regrets... Le temps qui passe... " Comme son ami Modiano, il laisse ses phrases en suspens. " On n'a pas forcément des pensées très... "

Une enfance bourgeoise et artistique

Comme Modiano aussi, Le-Tan scrute avec sa plume ou son stylo l'époque de la jeunesse de ses parents. À la recherche peut-être de secrets enfouis ou du paradis perdu. Son père, Le-Pho, peintre vietnamien, fils d'un vice-roi du Tonkin, vient en Europe en 1931 pour terminer ses études aux Beaux-Arts et visiter les musées. Il s'y installe définitivement en 1937 et épouse après la guerre la fille d'un officier français. Nés dans les années qui suivent, Pierre Le-Tan et son frère vivent une enfance bourgeoise et artistique rue de Vaugirard, à Paris. " J'étais un garçon un peu bizarre, qui préférait les musées et les antiquaires au foot, se souvient-il. Je regardais mon père peindre. En guise de jouets, il me donnait des cartes postales de tableaux ou d'estampes japonaises, ainsi que de vieux livres chinois ou japonais. C'est en regardant tout cela que j'ai appris à dessiner. J'ai été imbibé. Très tôt, j'ai su que, pour moi, c'était cela et pas autre chose : le dessin, et les objets d'arts. "

Le dessin, avant tout. À 17 ans, sur les conseils d'un ami de sa mère, américain, il envoie ses premières vignettes au New Yorker. Le prestigieux magazine de l'intelligentsia américaine en retient quelques-unes avant de publier deux couvertures de Le-Tan. " J'avais dix-neuf ans, j'habitais encore chez mes parents et je n'ai même pas pensé à toucher les chèques... " C'est le démarrage en fanfare d'une jolie carrière américaine. Tout en habitant Paris, il collabore régulièrement au New Yorker et prend pour agent Ted Riley, qui représente également Sempé et Steinberg. Il alimente ainsi en dessins les éditeurs, journaux et magazines d'outre-Atlantique, du New York Times à Vogue en passant par Fortune. Il publie aussi sur place plusieurs albums pour enfants et commence à créer des couvertures de livres pour les recueils d'anecdotes de son ami John Train, auteur notamment de Famous Financial Fiascos. De nombreuses suivront, pour Marcel Aymé, Mario Soldati, Harry Mathews, Peter Carey, Raymond Carver... et, bien sûr, Patrick Modiano. 



Couverture dessinée
par Pierre Le-Tan

Leur rencontre date de 1978. Une histoire étonnante. " J'ai découvert ses livres, il y avait des ambiances qui me touchaient", raconte Le-Tan. Et pour cause... Car quand il en parle à son père, celui-ci lui répond : " Modiano ? Mais oui, j'ai très bien connu ses parents à Paris, pendant la guerre... Nous nous fréquentions. " Les familles s'étaient ensuite perdues de vue. Autant dire que lorsque Pierre Le-Tan prend contact avec le jeune écrivain, ils sont en terrain de connaissance. Dans Memory Lane, le premier livre qu'ils concoctent ensemble, ils mettent en scène une galerie de personnages mais aussi de lieux qui ont hanté leurs enfances. Le Corner Bar, boulevard Malesherbes. Une villa au cap d'Antibes. La façade lézardée d'un bottier de luxe... " Je sentais que tout cela allait disparaître et qu'il fallait le fixer ", explique Le-Tan. Un bon résumé de son travail, qui rappelle souvent celui de Sempé

Nostalgique, il sait aussi se 
Un sac Le-Tan
montrer féroce. Un exemple ? Les Lettres de Marik Loisy (Aubier). Un pastiche qui réunit les écrits " les plus émouvants " d'un hypothétique grand homme " qui marqua profondément tant d'éminents esprits de sa génération ". C'est du moins ce qu'affirme la préface. Car les neuf courtes missives qui suivent se révèlent plus banales les unes que les autres. Comme celle-ci, adressée " à Monsieur et madame Congre " : " Nous passons d'excellentes vacances à Bonneville. Le temps est malheureusement maussade. Le casino est fermé. Tant pis. Bien à vous, Marik. " En regard de la lettre, une assez sinistre vue de la promenade du bord de mer à Bonneville.

Mélange de tendresse et de cruauté

Tout Le-Tan est là, qui se penche sur ses personnages "comme un entomologiste qui examine les insectes, avec un mélange de tendresse et de cruauté ", confie-t-il. L'insignifiant Marik Loisy se retrouve ainsi épinglé comme un papillon pâlot. Plusieurs ouvrages de la même veine paraîtront. Paris de ma jeunesseÉpaves et débris sur la plage... Son chef-d'oeuvre : Album, un magnifique scrapbook très coloré dans lequel Le-Tan réunit souvenirs de voyages, photos d'amis disparus, très jolis textes écrits à la main et, bien sûr, des centaines de dessins, le tout dans un savant désordre. On y croise Greta Garbo et Christian Lacroix, Marie-Laure de Noailles et Mick Jagger. On passe de Menton à Macao, avec un crochet par l'Angleterre, pour visiter l'ancienne maison du photographe Cecil Beaton, avec ses extravagants meubles "néo-rococo". Au détour d'une page, on tombe sur une " boîte à mégots " créée par Picasso, de surprenantes chaussures en forme de pieds signées Cardin ou encore une chaise percée trouvée à Versailles.

Les objets, c'est l'autre passion de Pierre Le-Tan. Il a commencé à les collectionner à 7 ou 8 ans, sous les encouragements de son père. Le feu n'est toujours pas éteint. " Il est capable de disparaître plusieurs jours à la recherche d'un buste antique dont on lui a parlé ", témoigne Patrick Modiano dans un texte qu'il a consacré à son ami. Il y a dix ans, après avoir amassé plusieurs centaines d'oeuvres de Bérard, Le-Tan a cédé l'essentiel de sa collection néo-romantique et surréaliste chez Sotheby's, à Londres. " Les gens se remettaient à parler de cet artiste très oublié, et cela m'intéressait moins. Tout à coup, les choses deviennent vulgaires... Aujourd'hui, j'ai le catalogue de la vente, avec des notes très bien faites, cela me suffit. " Depuis, il s'est lancé dans d'autres quêtes, écumant les magasins d'antiquités et les enchères à la recherche de tableaux, statues et autres vestiges de l'art religieux du xvie siècle. Mais où caser ses nouvelles acquisitions, alors que l'appartement déborde déjà de beaux livres, de gravures, de terres cuites, de bustes en marbre ?

L'entretien est fini, le carnet de notes rangé. Une dernière question, tout de même, sur le Vietnam, et voilà Le-Tan qui devient soudain volubile. " Non, je ne suis jamais allé dans ce pays. Je préfère rester sur un Vietnam un peu mythique. En revanche, je me sens très asiatique. J'habite à Paris, j'ai trois grands enfants juifs de nationalité britannique, un petit dernier à moitié africain ; mais être asiatique, pour moi, c'est un fait. J'ai un physique d'Asiatique. Je me comporte comme un Asiatique, avec cette façon d'être, cette réserve propre aux Asiatiques. Je suis aussi asiatique dans ma façon de dessiner des choses plutôt simples, avec des traits précis, minutieux, même quand il s'agit de représenter le flou. " Et derrière ses lunettes d'écaille rondes, comme dans l'Indochine des années trente, il plisse les yeux en souriant... 

Pierre Le-Tan, dessinateur asiatique ? Pourquoi pas. Il esquisse souvent des paysages très occidentaux, des avenues haussmaniennes désertes, les quais du port de Dublin, l'enseigne d'un bar de nuit qui brille au fond d'une rue sans nom, une cour d'immeuble, un garage en banlieue. Mais à chaque fois figure un petit personnage solitaire et fragile, comme un voyageur sous une ombrelle trouée. Ce promeneur mélancolique, c'est lui.

Denis Cosnard
© Série Limitée n° 046 du 08 septembre 2006

Remise de peine

La couverture du livre en édition de poche,
illustrée par une photo de Willy Ronnis
Remise de peine est un récit de Patrick Modiano publié en 1988. 

Première publication : Le Seuil, janvier 1988.

Repris en poche, collection Points Seuil, avec en couverture successivement deux dessins de Pierre Le-Tan représentant Frede, un des personnages du roman, puis une photo de Willy Ronis.
Traductions en espagnol (Exculpación, trad. Carlos R. Dampierre, Espasa-Calpe, 1988),  en allemand (Straferlaß, Suhrkamp, 1990), en néerlandais (Verdaagd verdriet, trad. Edu Borger, Arbeiderspers 1990), en italien (Riduzione di pena, trad. Maruzza Loria, avec en postface un entretien de Modiano avec Maryline Heck, éd. Lantana, 2011).

Fin 2007, Points Seuil a réuni les trois romans Remise de peineFleurs de ruine et Chien de printemps dans un volume unique,  accompagnés d’articles de presse et d’une postface de Nadia Butaud.
« La lecture des trois ouvrages devient vite obsédante. On traque les recoupements, cherchant un nom récurrent, une rue, une situation… Tout a été dit sur l’écriture de Modiano, ses évocations mélancoliques, cette façon de traquer le souvenir et de le rendre familier. Puis on lit ces trois livres et le plaisir nous submerge », commente Christine Ferniot dans Télérama.

Remise de peine fait également partie des dix "romans" réunis par Modiano dans un volume de la collection Quarto en mai 2013. A cette occasion, l'écrivain a indiqué, dans un entretien à Sylvain Bourmeau (Libération, 10 mai 2013), que Remise de peine n'est "pas vraiment" un roman. 

«C’est lié à un épisode de mon enfance assez énigmatique, commente-t-il. Nous étions, avec mon frère, dans une maison près de Jouy-en-Josas, entourés de gens étranges, et ça s’est terminé de manière brutale. Apparemment, c’était des amis de ma mère, dont une ou deux personnes qui, comme dans un roman policier, avaient fait quelque chose de répréhensible. Avec mon frère, nous nous sommes retrouvés tout seuls dans cette maison, et puis la police est arrivée, et mon père nous a récupérés. L’atmosphère était entre le Grand Meaulnes et la «Série noire». Les enfants vivaient alors dans un monde plus séparé de celui des adultes, la discipline était assez rigide, il n’y avait pas de télévision.»

Première couverture
illustrée par Pierre Le-Tan
Présentation par l’éditeur
« Une maison d’un étage, à la façade de lierre, dans un village des environs de Paris, où le narrateur, qu’on appelait plus facilement « Patoche » à l’époque, a grandi avec son petit frère car leur mère était partie pour jouer une pièce en tournée.
Une maison où ne vivaient que des femmes, une époque où tant de questions se bousculaient: qu’est-ce qu’une tête brûlée ? Et une « série noire » ? Eliot Salter, marquis de Caussade, reviendrait-il dans son château comme l’avais promis le père des enfants lors d’un déjeuner?
Tant d’étonnements aussi : "Pourquoi les policiers ne nous ont pas encore interrogés?" se demande encore Patoche, qui ajoute : "Pourtant les enfants regardent. Ils écoutent aussi."
Sans doute ne reste-t-il rien de tout ça que l’étui à cigarettes d’Annie, le sourire de Jean D., la grosse voiture de Roger Vincent dans le souvenir du narrateur qui n’a pu oublier. Ni la maison, ni ces femmes, ni leurs invités. Patoche regarde, écoute, il sait parfaitement que quelque chose de grave leur est arrivé. » 
(source : quatrième de couverture.)

Deuxième couverture
illustrée par Pierre Le-Tan


Dédicace : "Pour Dominique"

Personnages évoqués : "mon frère", "ma mère", "mon père", Annet Badel, Emmanuel Berl, Jacques Boudot-Lamotte, Jean D., Stioppa de D., Edmond Delehaye, Annie F, Mathilde F., Robert Fly, Frede, Georges Giorgini, Sacha Gordine, Grosclaude, "un certain Henri", Andrée K., Lucien P., Eddy Pagnon, Geza Pellmont, Zina Rachewsky, Eliot Salter, Savary, Hélène Toch, Roger Vincent.

A lire à propos de Remise de peine :

Jean-Michel Adam, Mémoire et fiction dans Remise de peine de ModianoRITM, n° 6 «Autofictions & Cie», Université de Paris X-Nanterre, pages 43-58.
Editions L'Harmattan, mai 2013


Frede, de Denis Cosnard 
La vraie vie du personnage de Modiano. 
Editions Les Equateurs, mai 2017 



La traduction italienne de Remise de peine (2011)

La Place de l’étoile

La Place de l’étoile est le premier livre de Patrick Modiano
Première publication : Gallimard, 28 mars 1968, avec une préface de Jean Cau.
Prix Roger-Nimier et prix Fénéon 1968.
Nouvelle édition revue et corrigée en 1985, collection blanche, 160 pages.
Repris en 1975 en collection Folio (n°698). La couverture a été successivement illustrée par Michel Gayout et Pierre Le-Tan.
Traductions en espagnol sous le titre El lugar de la estrella (Alcor - Martínez Roca, 1989), en néerlandais (De plaats van de ster).


Gallimard a accepté le manuscrit en 1967, mais en a reporté la publication en 1968, afin de ne pas susciter de polémique juste après la guerre des Six jours.

Présentation par l’éditeur
"En exergue de cet étonnant récit, une histoire juive : « Au mois de juin 1942, un officier allemand s'avance vers un jeune homme et lui dit : "Pardon, monsieur, où se trouve la place de l'Étoile  ?" Le jeune homme désigne le côté gauche de sa poitrine. » Voici, annoncé en quelques lignes, ce qui anime le roman : l'inguérissable blessure raciale.

Le narrateur, Raphaël Schlemilovitch, est un héros hallucinatoire. À travers lui, en trajets délirants, mille existences qui pourraient être les siennes passent et repassent dans une émouvante fantasmagorie. Mille identités contradictoires le soumettent au mouvement de la folie verbale où le Juif est tantôt roi, tantôt martyr et où la tragédie la plus douloureuse se dissimule sous la bouffonnerie. Ainsi voyons-nous défiler des personnages réels ou fictifs : Maurice Sachs et Otto Abetz, Lévy-Vendôme et le docteur Louis-Ferdinand Bardamu, Brasillach et Drieu la Rochelle, Marcel Proust et les tueurs de la Gestapo française, le capitaine Dreyfus et les amiraux pétainistes, Freud, Rebecca, Hitler, Eva Braun et tant d'autres, comparables à des figures de carrousels tournant follement dans l'espace et le temps. Mais la place de l'Étoile, le livre refermé, s'inscrit au centre exact de la « capitale de la douleur »." 

Dédicace : "Pour Rudy Modiano"

Personnages cités dans le livre : Joseph Joanovici, Gérard de NervalLucien RebatetPorfirio RubirosaMaurice Sachs, …



La première édition de poche,
illustrée par Michel Gayout
A lire à propos de La Place de l’étoile :

-Deux livres :
A Riffaterrean Reading of Patrick Modiano’s La Place de l’étoile, Investigating the Family Crime, par Charles O’Keefe, Summa Publications Inc., 2005 (209 pages).
Une lecture fondée sur les travaux du sémioticien Michel Riffaterre.

Dans la peau de Patrick Modiano, par Denis Cosnard, Fayard 2011.
Plusieurs chapitres de cet essai qui couvre l’ensemble de l’œuvre de Modiano concernent directement son premier roman.

-Des articles :

Trouble dans le patrimoine. L'imaginaire patrimonial de Patrick Modiano dans La Place de l'étoile, par Suzanne Lafont, in
Fictions d'histoire littéraire, coordonné par Jean-Louis Jeannelle,
Presses universitaires de Rennes, coll La Licorne, 2009.
Cet article étudie en particulier les références à Louis-Ferdinand Céline dans le roman de Modiano et montre comment on peut envisager autrement l'histoire littéraire nationale.

Pastiches de Proust : La place de l’étoile de Patrick Modiano, parAnnelies Schulte Nordholt, publié dans la revue bilingue annuelleMarcel Proust aujourd’hui (éditions Rodopi).
L’article insiste sur la façon dont Modiano, via son héros Shlemilovitch,« s’assimile à Proust comme le juif snob d’abord, comme le juif de la diaspora ensuite, pour découvrir que les deux positions sont devenues intenables aujourd’hui. Dans les nombreux romans qui suivront, on ne retrouvera ni le style ni la position de Proust, mais la thématique proustienne du temps, de la mémoire et de l’oubli persistera à occuper une place prépondérante. »

Du bon usage de quelques écrits collabos : celui de Raphaël Schlemilovitch, ‘‘le plus grand écrivain juif après Montaigne, Marcel Proust, Louis-Ferdinand Céline’’, par Anne-Marie Obajtek-Kirkwood, in Francographies numéro spécial 2 Nouvelle Série (1999), pp 307-323.
L’auteur y étudie la façon dont Modiano pastiches certains écrivains collaborateurs tels que Sachs, Drieu La Rochelle, Rebatet et Brasillach.

Modiano et son complexe, la carnavalisation de la mémoire dans La Place de l’étoile, par Philippe Zard, in Modiano ou les Intermittences de la mémoire, Hermann, 2010.

Quatre versions de La Place de l’étoile (1968-2008), par Jacques Lecarme, in Modiano ou les Intermittences de la mémoire, Hermann, 2010.

Une jeunesse

La couverture dessinée
par Pierre Le-Tan
Une jeunesse est un roman de Patrick Modiano, paru en 1981.


Première publication : Gallimard, collection blanche, 1981, 204 pages.
Repris en 1985 en collection Folio (n°1629), avec en couverture une illustration de Pierre Le-Tan.
Repris en 1995  en collection Folio plus (n°5), avec un dossier réalisé par Marie-Anne Macé.


Traductions en espagnol sous le titre Una Juventud (Alfaguara, 1983), en allemand sous le titre Eine Jugend (Suhrkamp-Verlag, 1985, trad. Peter Handke).

Présentation par l’éditeur

"Dans un Paris où ils sont livrés à eux-mêmes, deux très jeunes gens, Odile et Louis, font l'« apprentissage de la ville » et d'une vie de hasards, d'expédients et d'aventures.
Ils ont pour eux leur innocence et croisent sur leur route des individus singuliers, émouvants mais quelquefois peu recommandables qui les entraînent dans des chemins de traverse.
Mais, en définitive, aussi trouble et aussi chaotique que soit un début dans la vie, il se métamorphose, avec le temps, en un beau souvenir de jeunesse, que les deux héros de ce livre sont désormais seuls à partager." 
(source : site Gallimard)

Dédicace :
« Pour Rudy
Pour Zina
Pour Marie »

Moshé Mizrahi a tiré de ce roman un film en 1981, dont le titre est également Une jeunesse.

Couverture de Eine Jugend,
la traduction allemande du roman 
A lire :