samedi 25 février 2012

Lucien Rebatet vu par Patrick Modiano

En 1942, Rebatet dédicace Les Décombres à la librairie Rive Gauche
Ecrivain et journaliste français, Lucien Rebatet  (1903-1972) a notamment travaillé à "Je suis partout" avant guerre et "Rivarol" après guerre. Il est en particulier l’auteur du livre Les Décombres.
Il fut arrêté en 1945 pour collaboration avec les Nazis, et libéré en 1952.

Lucien Rebatet fait partie des nombreux auteurs évoqués et pastichés par Patrick Modiano dans La Place de l’étoile. Rebatet y est cité à la fois directement et à travers le personnage de Léon Rabatête (dont le prénom peut évoquer un autre antisémite, Léon Daudet).
"Mon père avait bien-sûr acheté des livres pendant l’Occupation, Rebatet, Céline, toute la clique", précise Modiano dans un entretien à Dominique Jamet ("Lire", octobre 1975).

A propos des nombreux auteurs cités et pastichés dans La Place de l'étoile : "Modiano : la voix palimpseste sur la place de l’étoile", par Maxime Decout (revue "Littérature" n°162, 2011). 
Un site à la gloire de l'œuvre littéraire de Lucien Rebatet: les études rebatiennes.


dimanche 19 février 2012

Sacha Gordine vu par Patrick Modiano

Né à Paris le 27 février 1910 et mort le 8 juin 1968, Sacha Gordine était producteur de cinéma et passionné d’automobile.

Il apparaît à plusieurs reprises dans l’œuvre de Patrick Modiano, qui le présente comme l’un des amis de son père pendant la guerre.

Dans Villa Triste, son nom fait partie des bribes qui reviennent à la mémoire du narrateur :
"GORDINE (FILMS SACHA) : 19, rue Spontini – Paris-XVIe – KLE. 77-94.
M. Sacha Gordine, GER."
Le narrateur mentionne également l’un des films produits par Sacha Gordine, La Polka des menottes.

Dans Un pedigree, Modiano précise :
"Les personnes que j’ai identifiées parmi toutes celles qu’il [son père, Albert Modiano] fréquentait en ce temps-là, sont Henri Lagroua, Sacha Gordine, Freddie McEvoy (…)".
"On recherche Sacha Gordine, l’un des plus anciens amis de mon père, comme le montre une lettre de la direction du statut des personnes du Commissariat général aux Questions juives au directeur d’une « Section d’enquête et de contrôle » : ‘‘Le 6 avril 1944. Par la note citée en référence, je vous avais demandé de procéder d’urgence à l’arrestation du juif Gordine Sacha pour infraction à la loi du 2 juin 1941. Vous m’avez fait savoir à la suite de cette note que celui-ci avait quitté son domicile sans faire connaître sa nouvelle adresse. Or il a été vu ces jours-ci circulant en bicyclette dans les rues de Paris. Je vous serais donc obligé de vouloir bien faire une nouvelle visite à son domicile afin de pouvoir donner suite à ma note du 25 janvier dernier.’’ "
Sacha Gordine et sa société Films Sacha Gordine ont produit les films suivants :
-L’Extravagante mission (1945)
-L’idiot (1946)
-Jericho (1946)
-La Marie du port (1949)
-Un homme marche dans le ville (1949)
-Barry (1949)
-Les miracles n’ont lieu qu’une fois (1950)
-Juliette ou la clef des songes (1950)
-Gunman in the Streets (1950)
-1er mai ou Le père et l’enfant (1957)
-La Polka des menottes (1957)
-Dédée d’Anvers (1947)
-La Ronde (1950)
-Orfeu Negro (1959)
-Le Tout pour le tout (1963).

Sacha Gordine était également un grand amateur de course automobile, au point d’avoir créé sa propre société, la Société des Automobiles Gordine (SAG) pour construire une voiture de course française, au début des années 1950.
Pour en savoir plus : un forum à propos de Gordine et des voitures de course.

dimanche 5 février 2012

Marie Modiano chez Gallimard



Marie Modiano, la seconde fille de Patrick Modiano et Dominique Zehrfuss, qui jusqu'à présent chantait des textes en anglais, publie en ce mois de février son premier livre. Ce recueil de poèmes, Espérance mathématique, est édité par L'Arbalète, filiale de Gallimard. 

L'éditeur présente ce livre en quelques mots : "Pays que l’on traverse sans s’arrêter, amours enfuies, villes rêvées, forêts fantastiques... Voici quelques-uns des motifs de prédilection de Marie Modiano. Une poésie faite toute entière de variété, où les vers changent de mesure au fil du recueil, s’allongeant jusqu’à se transformer en prose, s’écourtant jusqu’à former des comptines, inventant à chaque fois un nouveau rythme et un nouveau ton."

"Ce qui frappe, à la lecture, c'est ce mélange de nostalgie et de vitalité, commente Mohammed Aissaoui dans "Le Figaro". Si l'humour est la politesse du désespoir, alors, chez Marie Modiano, le sourire - elle sourit tout le temps - est le masque de la mélancolie. Une phrase, parmi d'autres, qui en dit long: «Les anges camouflent souvent la douleur.» Il y a de la grâce et de la gravité dans ce recueil. «Où est mon pays?», s'interroge la voyageuse. Elle y répond, ailleurs: «Peu importe le pays,/Je m'y sens chez moi ;/Et bien qu'il fasse sombre,/Les fantômes qu'on y croise/Ne me font jamais peur./C'est le refuge de ceux qui rêvent un peu plus fort que d'autres (…)»
Pour lire l'article complet


A lire aussi, un entretien accordé par Marie Modiano à "L'Express".
"Mon père m'a toujours beaucoup soutenue, surtout quand je lui ai lu les poèmes de ce recueil. Nous évoquons souvent ensemble les différences qu'il y a entre le roman et la poésie", y indique-t-elle notamment.

samedi 4 février 2012

Le docteur Manh-Don, trait d'union entre Modiano et Le-Tan

C’est "à la mémoire du docteur Nguyen-Manh-Don" qu’est dédicacé Memory Lane, le récit de Patrick Modiano accompagné de dessins de Pierre Le-Tan publié en 1981.

Il s’agit d’un personnage réel, un médecin vietnamien que connurent à la fois les parents de Modiano et ceux de Le-Tan à Paris, pendant la seconde guerre mondiale.

Patrick Modiano l’évoque dans un texte sur Pierre Le-Tan ("J’ai connu Pierre Le-Tan…") : le père du dessinateur, alors jeune peintre vietnamien, "avait lié amitié avec mes parents pendant l’Occupation, à Paris, ainsi que tout un groupe d’autres artistes, comme les peintres Maï-Thu et Vu-Cao-Dam, et le mystérieux docteur Manh-Don qui introduisait l’acupuncture en France, et qui, à l’époque, était acteur de cinéma et avait joué dans le film de Georg-Wilhelm Pabst : Le Drame de Shangaï."

De son côté, Pierre Le-Tan consacre un chapitre de Paris de ma jeunesse (album dont Modiano a justement signé la préface) à ce mystérieux personnage, rebaptisé pour l’occasion docteur Van Son.
Il était "le meilleur ami de mon père, écrit Le-Tan. Ce médecin mondain aux allures de play-boy était pour mon frère et moi une figure mythique. (…)
Je pourrais décrire son appartement de la rue de l’Université avec précision. (…) Dans le petit salon, (le tableau) qui m’impressionnait le plus était un dessin de Matisse au dessous duquel le maître avait inscrit: « Au docteur Van Son, mon sauveur ». (…)
Cet homme qui nous appelait « mon petit chat » avait l’aura d’une vedette de cinéma – il avait d’ailleurs joué dans un film de Pabst. (…)
De tous les vietnamiens Van Son était le plus « parisien ». Et pourtant il était resté profondément oriental. Un bonze l’accompagnait pour son dernier voyage au cimetière du Montparnasse, et l’empereur Bao Daï dirigeait le cortège. »

Timbres représentant l'empereur Bao Dai