Albert Modiano en 1930 |
Albert Modiano est le père de Patrick Modiano (1912-1977). Sa figure hante une grande partie de l'oeuvre de son fils, en particulier jusqu'à Dora Bruder puis Un pedigree.
Patrick Modiano évoque longuement son père dans Un pedigree.
"Mon père est né en 1912 à Paris, square Pétrelle, à la lisière du IXe et du Xeme arrondissement. Son père à lui était originaire de Salonique et appartenait à une famille juive de Toscane établie dans l’empire ottoman." (Un pedigree)
"Mon père est né en 1912 à Paris, square Pétrelle, à la lisière du IXe et du Xeme arrondissement. Son père à lui était originaire de Salonique et appartenait à une famille juive de Toscane établie dans l’empire ottoman." (Un pedigree)
Sa famille avait émigré de Modène à Trieste, Salonique, Alexandrie, enfin Paris.
"Enfance dans le Xe arrondissement, cité d’Hauteville. Collège Chaptal où il était interne (…) Dans son enfance et son adolescence, il est livré à lui-même (…) Son prénom est Alberto, mais on l’appelle Aldo." (Un pedigree)
Très jeune, il se livre à des affaires et trafics divers.
"Juste avant la guerre, il a pris en gérance une boutique de bas et parfums" (Un pedigree).
Pendant la guerre, il ne se présente pas au recensement d’octobre 1940, ne porte donc pas l’étoile jaune, et se cache.
Durant l’Occupation, "mon père était obligé de se cacher, évidemment. (…) Il est resté à Paris jusqu’à la fin de l’Occupation. Sous une fausse identité. C’était une vie clandestine. (…) Il avait des activités d’ordre plus ou moins financier, pas douteuses, chimériques plutôt. (…) Il a été plus ou moins en rapport pour des raisons assez bizarres avec Maurice Sachs qui faisait du trafic d’or. (…) J’aimerais en savoir davantage, mais je ne l’ai pas revu depuis une dizaine d’années. Pour des raisons familiales" (entretien avec Dominique Jamet, "Lire", octobre 1975).
La fausse identité en cause est celle de son ami Henri Lagroua.
Parmi ses autres amis de l’époque, Modiano mentionne Sacha Gordine.
En février 1942, il s’évade lors d’une rafle qui aurait pu le conduire à Auschwitz.
En février 1942, il s’évade lors d’une rafle qui aurait pu le conduire à Auschwitz.
Son amie Hela H., arrêtée en même temps que lui, "sera libérée (…) le lendemain, sans doute à la suite de l’intervention d’un ami de mon père. Qui ? Je me le suis souvent demandé." (Un pedigree).
Il est arrêté une autre fois, l’hiver 1943. "Il avait été emmené au Dépôt, d’où "quelqu’un" l’avait fait libérer" (Un pedigree). Dans Remise de peine, Fleurs de ruine et De si braves garçons, le narrateur évoque l’hypothèse que ce quelqu’un soit Louis Pagnon, dit Eddy Pagnon, un collaborateur, membre de la bande de la rue Lauriston. Mais cette hypothèse n'est plus citée dans Un pedigree.
"En 1942, à Paris, il fait connaissance d’une jeune comédienne qui vient d’arriver de Belgique, Luisa Colpeyn. Ils se marient en novembre 1944, après la Libération. Je suis né en 1945 et mon frère Rudy en 1947." ("Mon grand-père est né...")
Albert Modiano peu après la guerre |
(Pendant mon adolescence), "mon père avait l’apparence d’être riche, mais il était un peu mythomane. En fait, il avait des problèmes financiers, dont il se tirait par des pirouettes." (entretien avec Dominique Jamet, 1975.)
Dans sa notice du "Who’s who in France", Patrick Modiano présente son père comme "administrateur de sociétés". Celui-ci effectue de nombreux voyages, notamment en Afrique, à Brazzaville. Il dispose d’un bureau 1 rue Lord-Byron, à Paris, d’où il dirige la Société africaine d’entreprise. (Un pedigree).
"Mes parents se sont séparés au début des années 1960." ("Mon grand-père est né…").
Albert Modiano se remarie ensuite avec "une Italienne très nerveuse, de vingt ans plus jeune que lui, les cheveux jaune paille et l’allure d’une fausse Mylène Demongeot. (…) Ils habitent au quatrième étage [du 15, quai de Conti], au dessus de chez ma mère." (Un pedigree).
Peu présent auprès de Patrick Modiano et de son frère, Albert Modiano cherche à deux reprises dans les années 1960 à se débarrasser de Patrick. Les deux épisodes, très marquants, reviennent plusieurs fois dans l’œuvre de Modiano :
-une première fois, son père le dénonce à la police ;
-une seconde, en 1966, il lui prend ses papiers militaires pour l’enrôler de force dans l’armée.
"Mon père, ayant intercepté mes papiers militaires, s’est présenté à la caserne de Reuilly, sans me prévenir, pour provoquer mon incorporation immédiate. J’ai pu y échapper, de justesse, en refusant de signer (j’étais encore inscrit à la faculté de lettres et j’avais droit à un sursis)." (Lettre à Thierry Laurent, 1996).
"Mon père est mort en 1977" ("Mon grand-père est né…").
Il serait mort "dans des circonstances non élucidées" (dixit Pierre Assouline, Lire 1990), à proximité du lac Léman en Suisse.
"Septembre [1977] : mort de son père en Suisse sans que personne ne le prévienne. Il ne l'avait pas revu depuis onze ans." ("Repères biographiques", Cahier de L'Herne Modiano, 2012)
La figure de ce père absent, mystérieux, au comportement trouble, se trouve au cœur de l’œuvre de Patrick Modiano. De nombreux personnages en semblent inspirés. Une interrogation revient : de quelles affaires s’occupait donc Albert Modiano ? Dans les premiers romans, l'image donnée d'Albert Modiano par son fils est passablement dégradée. C'est celle d'un "schlemiehl", d'un homme déchu ayant frayé avec les collabos. Puis, au fil des livres, en particulier Dora Bruder, le père se trouve peu à peu réhabilité. A l'occasion de la réédition de Livret de famille en édition de poche, en 2011, Patrick Modiano a choisi de publier en couverture une photographie de son père. Cette photographie figure également dans le "Cahier de L'Herne" consacré à Modiano (2012). On voit Albert Modiano âgé de 18 ans, posant pour le photographe sur un balcon. Le voici ainsi définitivement sorti de l'ombre.
Il faudrait reconstruire l’histoire de la famille Modiano de Salonique. Ici sur la Lac Majeur, où j’habite, les SS ont tué 16 juifs y compris Giacomo, Carlo, Grazia e Daniele Modiano de Salonique. Ce massacre est connu comme le massacre de l’Hotel Meina (15 – 23 de Septembre 1943). Peut-être parents de Patrick. C’est difficile à dire.
RépondreSupprimer"...Quatre cousins de mon père, Carlo, Grazia, Giacomo et sa femme Mary, seront assassinés par le SS en Italie, à Arona, sur le lac Majeur, en septembre 1943..." (Un pedigree, page 12 Editions Gallimard 2005)
SupprimerMerci Silvia! Nous avons des amours en commune, Patrick sans doute mais Guido Gozzano aussi, je crois!
SupprimerEh si! :)
SupprimerSaul David Modiano, nato a Salonicco in una famiglia di commercianti e approdato a Trieste nel 1868 con lo scopo di sviluppare il traffico commerciale con l’oriente. Nel 1884 amplia la gamma dei suoi prodotti, avviando una litografia che fece scuola per le riproduzioni artistiche e per la produzione di carte da gioco. La ditta esiste ancora ed è la più famosa in Italia. Saranno della stessa famiglia?
RépondreSupprimerPeut etre monsieur, il faudrait faire des recherches. Mais, à comptes rendus, l'unique personne qui pourrait etre interessé est Patrick Modiano, lui seul.
SupprimerPeut etre monsieur, il faudrait faire des recherches. Mais, à comptes rendus, l'unique personne qui pourrait etre interessé est Patrick Modiano, lui seul.
SupprimerMon opinion est que les Modianos ont une origine unique (non-prouvé). Voir le site de feu Mario Modiano (http://themodianos.com/).
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