mercredi 9 juillet 2025

70 bis, un nouveau Modiano cosigné avec Christian Mazzalai

 

Le 70 bis, rue Notre-Dame-des-Champs


Double surprise pour l'automne : le traditionnel Modiano qui paraît un an sur deux à cette saison ne sera ni un roman, ni signé du seul Prix Nobel de littérature. Il s'agira d'un récit à quatre mains autour d'un lieu parisien. Il paraîtra le 2 octobre dans la collection blanche de Gallimard, comme les précédents. Prix prévu : 19 euros.

Le titre : 70 bis. Depuis La Place de l'étoile en 1968, Patrick Modiano est un habitué des titres en forme d'adresse : Villa Triste, Rue des boutiques obscures, Memory Lane... C'est à nouveau le cas ici. Le 70 bis du titre correspond à un lieu parisien empreint d'histoire, rue Notre-Dame-des-Champs, dans le quartier de Montparnasse. Il fut fréquenté par de nombreux artistes : peintres, sculpteurs, écrivains. Parmi eux, Modiano cite "Monet, Renoir, Picasso, George Sand, mais aussi le singe Jacques, le jeune étudiant anglais Robert Short, sœur Emmanuelle, le Cavalier Bleu, Rita Renoir". Sans oublier le poète et musicien américain Ezra Pound (1885-1972).

Le coauteur : Christian Mazzalai. Guitariste, choriste, compositeur, il est surtout connu comme membre fondateur du groupe pop-rock français Phoenix. Il est né en 1977, soit 32 ans après Patrick Modiano.

Le point de départ. "J’habite le quartier depuis un certain temps", raconte Christian Mazzalai dans un entretien diffusé par Gallimard. Après une longue tournée à l’étranger, "j’ai eu l’occasion de travailler dans un studio d’enregistrement tout près du 70 bis, poursuit-il. J’avais repéré qu’à plusieurs reprises une dame américaine s’arrêtait devant le 70 bis. Elle a fini par me dire que son père était peut-être Ezra Pound, qui avait habité dans cette maison. Cela a été le début de notre enquête." Un de ses amis lui a aussi remis une caisse de documents trouvée dans une cave du 70bis. "Ces documents concernaient de nombreux habitants du 70bis, du Second Empire jusqu’à nos jours", précise Patrick Modiano.

Le livre résumé par Gallimard. "Remontant le temps grâce à des archives retrouvées, des photographies et des petites annonces, l'écrivain et le musicien font revivre les ateliers du 70 bis rue Notre-Dame-des-Champs, qui virent défiler, du Second Empire à l'après-guerre, peintres, écrivains et poètes, illustres ou inconnus, venus d'Amérique, du Japon ou d'ailleurs pour tenter leur chance à Paris."

Le projet vu par Modiano. "Il s’agit bien d’un carnet de fouilles où sont répertoriées des photos, des petites annonces de journaux qui nous parvenaient du 70 bis comme des signaux de morse, des faits divers qui ont eu lieu à cette adresse".

L'extrait. "La rue Notre-Dame-des-Champs se trouve au cœur du village de Montparnasse. Mais peut-on parler d’un village comme on le dit de Montmartre ? Il n’existe pas, pour le Montparnasse d’il y a deux cents ans, l’équivalent des pages si émouvantes et si élégiaques que Gérard de Nerval a consacrées au Montmartre des années dix-huit cent quarante […] Alors il faut rêver à ce que pouvait être à la même époque la rue Notre-Dame-des-Champs, qui s’était appelée jadis le “chemin Herbu”."

Ezra Pound au 70 bis


mardi 14 mai 2024

Patrick Modiano rend hommage à Bernard Pivot

Bernard Pivot s'était mis en grand habit pour la remise du Prix Nobel
à Patrick Modiano, le 10 décembre 2014 à Stockholm (photo Denis Cosnard)

Patrick Modiano était un habitué d'Apostrophes et des autres émissions télévisées de Bernard Pivot. Mais les deux hommes se connaissaient de bien plus longue date : Pivot, alors "courriériste" au Figaro, avait été le premier journaliste, en 1968, à repérer La Place de l'étoile et son tout jeune auteur. 

A l'occasion de la mort de Bernard Pivot, survenue le 6 mai 2024, Patrick Modiano a rendu hommage à ce journaliste d'exception dans un article paru le dimanche 12 mai dans La Tribune. Sous le titre "Bernard, mon premier lecteur", l'écrivain y raconte leur toute première rencontre : "Bernard, dans mon souvenir, sera toujours lié à ce printemps-là où il flottait dans l’air une certaine fraîcheur et une certaine innocence: le printemps de 1968. Je venais de publier un premier livre et il m’avait envoyé un petit mot que j’ai gardé comme un talisman car il a été mon premier lecteur." 

Il évoque aussi la suite de leur relation, jusqu'à ces dernières années : "Et plus de cinquante ans plus tard, lors de nos derniers rendez-vous, ce n’est pas de Paris que nous avons parlé, mais de Lyon, la ville de son enfance, une ville qui m’avait beaucoup frappé vers 17 ans, et dont j’avais toujours regretté de n’avoir pas fait le décor d’un roman. Cette fois-ci c’était moi qui lui posais des questions, comme lui à Apostrophes."

dimanche 28 avril 2024

Paris des jours et des nuits : 10 nouveaux textes de Modiano réunis en un volume


Après un premier recueil de plus de 1000 pages publié en 2013, un deuxième volume de la collection Quarto des éditions Gallimard est consacré à Patrick Modiano. 

Intitulé Paris des jours et des nuits, ce livre de 1120 pages est publié le 26 septembre 2024, à un prix de 28 euros.

Ce nouveau recueil réunit, comme le précédent, une petite dizaine de romans. Tous se déroulent pour l'essentiel à Paris. Au programme, établi par Patrick Modiano, figurent De si braves garçons (1982), Quartier perdu (1985), Voyage de noces (1990), Un cirque passe (1992), Du plus loin de l'oubli (1996), Des inconnues (1999), La Petite Bijou (2001), Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier (2014), et Encre sympathique (2019).

Le volume comprend également un texte autour de photographies de Brassaï, déjà paru en 2022 dans un album de Reporters sans frontières. 

Ce deuxième Quarto comporte en outre un court avant-propos inédit de Patrick Modiano, ainsi qu'une sélection d'une vingtaine de photographies de Paris représentant des lieux qu'il a découverts ou fréquentés entre 1953 et 1972, "vingt années où j'ai fait l'apprentissage de la ville", écrit l'auteur. Ces photographies signées René-Jacques, Marcel Louchet, André Kertész ou encore Luc Mary-Rabine sont accompagnées de légendes extraites pour la plupart des romans rassemblés dans ce recueil. 

Dans son avant-propos, Patrick Modiano évoque notamment son travail sur Paris : 

"J'avais besoin sans doute d'un espace délimité, de façades et d'entrées d'immeubles bien précises avec leurs vrais numéros : 1 rue Lord-Byron, 31 rue Radziwill, 4 rue Albert de Mun, 28 rue de l'Aude... Non par un souci de réalisme ou de vérité, mais il me semblait que plus les détails seraient précis, plus à partir d'eux, le rêve pourrait se développer."

samedi 24 février 2024

Une rencontre Modiano ce lundi 26 février à Paris


Se retrouver entre lecteurs de Modiano dans un café calme, et discuter d'un ou deux livres qui nous ont marqués. C'est ce que propose l'un de ces lecteurs, Jean-Marc Cahen, aux amateurs du Prix Nobel de littérature.
Une première rencontre est prévue ce lundi 26 février à 18h au "Paris Italie", 29 avenue d'Italie, dans le 13e arrondissement de Paris (métro Place d'Italie).
Ce sera l'occasion de parler de deux des plus beaux romans de Modiano, Rue de Boutiques Obscures et La Petite Bijou, d'échanger sur le style, le contenu de ces livres, et d'en lire des extraits.
"Venez heureux, venez nombreux", tel est l'appel de Jean-Marc Cahen.

dimanche 4 février 2024

Une cousine de Dora Bruder arrachée à l'oubli



Plus de vingt-cinq ans après Dora Bruder, une de ses cousines éloignées vient à son tour d'être arrachée à l'oubli grâce à un livre.

Universitaire, spécialiste reconnu du droit constitutionnel et de l'évolution de la démocratie, Bastien François a, un temps, délaissé sa discipline pour écrire un livre émouvant et rigoureux sur Estelle Moufflarge, une jeune fille arrêtée à Paris et morte à Auschwitz en 1943, alors qu'elle avait à tout juste 16 ans. Son ouvrage, publié comme Dora Bruder chez Gallimard, s'intitule Retrouver Estelle Moufflarge.

Bastien François a "rencontré" Estelle Moufflarge en 2014, grâce à une carte interactive permettant de savoir où habitaient les 11 458 enfants juifs envoyés de France vers les camps de la mort entre 1942 et 1944. Il saisit sa propre adresse, rue Caulaincourt, à Montmartre, et un seul nom apparaît, celui d'Estelle Moufflarge. Elle habitait au 89, à quelques immeubles du sien. En bas de chez elle, le café Au rêve, fréquenté au fil des ans par Simenon, Céline, Marcel Aymé, Jacques Brel, Patrick Modiano et bien d’autres, existait déjà.

C'est au cours de ses recherches, grâce à des membres de la famille Moufflarge, que Bastien François découvre qu'Estelle était une "cousine éloignée" de Dora Bruder. Une tante d'Estelle, Rose Muflarz née Burdej (1910-2003), était en effet une cousine de Cécile Bruder (née Burdej), la mère de Dora Bruder.

Cette découverte a constitué une "grande difficulté" pour Bastien François qui a beaucoup hésité à évoquer ce cousinage dans son livre, a-t-il expliqué au Monde. Il était évidemment tentant de donner cette information précise, vérifiée, et qui pouvait contribuer à montrer le milieu dans lequel évoluait Estelle Moufflarge. En même temps, le risque était grand de placer ainsi Estelle Moufflarge dans l’ombre de sa cousine devenue un symbole de la Shoah - et, pour Bastien François, à se situer lui-même sous la tutelle de Modiano, Prix Nobel de littérature 2014. 
« J’ai finalement donné l’information, sans la mettre en avant, a indiqué l'auteur au Monde. Et je n’ai pas relu Dora Bruder, pour ne pas écrire mon livre avec, ni ­contre, celui de Modiano. »